Jean COCTEAU, (1889-1963), fit du cinéma un art poétique majeur en inspirant à ses films un rythme visuel proche de la musique.
« L'enfance croit ce qu'on lui raconte et ne le met pas en doute. Elle croit qu'une rose qu'on cueille peut attirer des drames dans une famille. Elle croit que les mains d'une bête humaine qui tue se mettent à fumer et que cette bête à honte lorsqu'une jeune fille habite sa maison.
Elle croit mille autres choses bien naïves. C'est un peu de cette naïveté que je vous demande et pour nous porter chance à tous, laissez-moi vous dire quatre mots magiques, véritable « Sésame ouvre- toi » de l'enfance :
Il était une fois...(Jean Cocteau)
Des jeux d'ombres et de lumières introduisent le merveilleux et ses clair-obscurs suscitent le mystère.
A la magie de la lumière il a ajouté l'insolite qui nous surprend et nous éloigne de la réalité pour nous projeter dans un univers onirique.
Ici l'inanimé prend vie ou plutôt se révèle dans une autre essence : manifestation d'une volonté surnaturelle. Les statues restent de pierre mais elles ont des regards, les choses conservent leurs formes authentiques mais elles agissent , servent , blessent ou parfois même tuent. Les miroirs réfléchissent les pensées de celui qui s'y regarde mais ils sont aussi chaîne avec celui dont nous sommes séparés .
Sensible à l'art de la danse, Cocteau savait que par la grâce les corps échappent à leur fonctions habituelles et il en a imprégné les mouvements des objets qu'il anime comme ces voiles qui accompagnent la Belle dans les longs corridors , séduisants par leur légèreté, angoissants par l'incertitude des forces qu'ils dissimulent : brise nocturne ou souffle de la Bête .
L'ambiguïté suspend notre critique , l'attachement au crédible s'efface et nous nous abandonnons à la poésie .
Autres éléments poétiques: le dialogue avec ces quelques réparties suggestives :
- Mon père rapportez-moi une rose, car il n'y en pas ici
- Vous volez mes roses qui sont ce que j'aime le mieux au monde. Vous jouez de malchance car vous pouviez tout prendre chez moi sauf mes roses. Il se trouve que ce simple vol mérite la mort.
- Réfléchissez pour moi, je réfléchirai pour vous . (le miroir)
- Belle il ne faut pas me regarder avec ces yeux !
- Mon cœur est bon mais je suis un homme
- Je n'ai point d'esprit
- Vous avez l'esprit de vous en rendre compte- Et cependant votre rêve est d'être loin de moi
- Fermez votre porte , votre regard me brûle
- Ma nuit n'est pas la vôtre ; il fait nuit chez moi c'est le matin chez vous.
- La rose , le miroir, ma clé d'or , mon cheval et mon gant sont les cinq secrets de ma puissance-
- J'ai pas peur , je réfléchis (Ludovic)
- Ça se ressemble(Avenant)- Mais les pauvres bêtes qui veulent prouver leur amour ne savent que se coucher par terre et mourir.
Je ne voudrais pas oublier ce qui pour moi symbolise ce conte , l'introduction que nous ne devons qu'à Cocteau du Magnifique, le cheval fabuleux qui au gré de la célèbre formule magique , se charge dans ses aller-retours de tous les espoirs de la Bête :
« Va ou je vais le magnifique , va, va, va »
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http://fousdanim.free.fr/dossiers/elucubrations/cour01.html Une analyse psychologique à partir de l'adaptation cinématographique de J. Cocteau