C'est durant la jeunesse de Tolstoï, qu'Auguste Comte commence son cours de philosophie positive, que Tocqueville travaille à De la Démocratie en Amérique, que Marx écrit son Manifeste du Parti communiste.
Tandis qu'il compose Guerre et Paix, Darwin élabore sa théorie sur l'évolution, Spenser ses Principes de sociologie, Bakounine Etatisme et anarchie. Marx poursuit avec le Capital. Les idées féministes progressent tandis qu'il écrit Anna Karénine et Résurrection.
Le monde de Tolstoï est un monde socialement en ébullition . Depuis longtemps, la révolution Française a secoué les bases des Institutions mais la révolution industrielle continue de déstabiliser états, nations et populations. De nouvelles couches sociales sont apparues avec confrontation exacerbées d'intérêts. Le besoin d'émancipation des secteurs les plus opprimés (classe laborieuse, serfs, femmes ) prennent conscience de leurs droits et de leur pouvoir . L'équilibre social cherche sa voie. Matérialisme ou Utopie religieuse ? Les Sciences bousculent les vieux mythes. L'homme prend possession de la Terre pour y défendre son droit au bonheur immédiat et rompre avec le fatalisme d'une existence misérable, le lot de la condition humaine coupable et repentante . Laïcité , aspiration à l'égalité devant les biens et les ressources, solidarité de classe , certains veulent aller très vite , l'anarchie de Proudhon et de Bakounine fleurit opposée au socialisme utopique de Fourier et de Comte puis au socialisme scientifique de Marx .
En Angleterre et en Allemagne notamment le Christianisme social lui répond et se dresse à son tour contre les injustices de l'économie capitaliste .
Les idées oscillent entre nationalisme et internationalisme. Tandis que les frontières fondent dans le socialisme ouvrier, les états s'affrontent pour assurer leur suprématie et s'adjuger de nouveaux territoires en Afrique, en Asie, en Inde en développant le colonialisme.
La Russie de Tolstoï voit l'abolition du servage en 1861, (Aux Etats Unis en 1865 le Congrès vote l'abolition de l'esclavage) cause pour laquelle il n'aura cessé de militer en développant par anticipation des expériences sur ses propres domaines et en proposant des systèmes d'Education populaire pour compléter la réforme.. Son engagement permanent pour défendre les masses populaires contre l'élite aristocratique ne le conduiront pas toutefois à adhérer aux mouvements révolutionnaires dont il condamne la violence.
En 1877, Tolstoï traverse une importante crise spirituelle : "Saisi par le vertige du néant, il éprouve douloureusement l'impossibilité de vivre sans la foi qu'il découvre intacte chez les gens du peuple " (Michel Aucouturier)
Il s'écarte pourtant de l'église avec laquelle il entre en conflit , il recherche le vrai "message biblique" qu'il considère altéré par la tradition Juive et l'enseignement de l'Eglise. ( Rejetant la divinité du Christ , il sera excommunié en 1901) .
Contestant les autorités civiles et religieuses , sa vie est désormais consacrée à la dénonciation des excès du monde moderne, soumis au pouvoir maléfique de l'argent, à la poursuite du superflu, à la machine ; l'art moderne sera lui aussi condamné par sa morale vouée à l'authentique vérité de l'esthétique populaire.
Fidèle aux classes modestes , confiant dans la sagesse du peuple, Tolstoï s'est élevé toute sa vie contre le mensonge et l'hypocrisie mais surtout contre l'exploitation de l'homme par l'homme.
L'existence austère qu'il adopte à la fin de sa vie ne réussira pas à l'isoler ni à porter atteinte à l'immense autorité morale qu'il a acquise dans le monde entier .
Un panorama sur le monde de Tolstoï
Le Monde des idées
1830 A. Comte commence son cours de philosophie positive et en 1854 Système de politique positive
1836 A. de Tocqueville travaille à : De la démocratie en Amérique
1848 K. Marx Manifeste du Parti communiste 1867 Tome I du Capital
1871 Darwin : de la descendance de l'homme
1873 Bakounine : étatisme et anarchie
1877 Spencer : principes de sociologie
Gobineau
Les Philosophes
A. Comte (1798-1857)
Kierkegaard (1813-1855)
K. Marx (1818-1883)
Nietzche (1844-1900)
Freud (1856-1939)
Husserl (1859-1938)
Alain (1868-1951)
Schopenhauer (1788-1860)
Engels (1820-1895)
Bergson (1859-1941)
Cournot (1801-1877)
Gandhi (1869-1948)
Le monde des arts
Littérature et Poésie:
Apollinaire - Balzac -Baudelaire - E. Brontë - Conrad -Daudet -Dickens - Dostoievski -A. Dumas - Eliade - G. Eliot - Flaubert -A. France - T. Gautier -Goethe - Gogol -Heine -J.M. Hérédia -Victor Hugo - Huysmans-Ibsen - Lamartine - Leconte de Lisle -Lönnrot (le Kalevala ) - Lermontov - Loti - Mallarmé -Maupassant -Mérimée - Musset -Michelet - G. de Nerval - E. Poe - Pouchkine - Rimbaud - - Sainte- Beuve - G. Sand - Schiller - Stendhal -Taine - Tennyson - Tocqueville - Tourguéniev -Verlaine - Jules Verne - Vigny - O. Wilde - Zola -
Peinture -sculpture
Cézanne - Constable -Corot -Courbet - Daumier - Degas - Delacroix -Gauguin - Manet- Millet -Monet - Renoir - Rodin - Dante Gabriel Rossetti - Rude - Seurat -Turner.
Musique
Berlioz - Bizet - Borodine -Brahms - Debussy - Dvorak - Fauré - Gounod -Grieg -Lalo - Liszt - Massenet - Mendelssohn - Mahler - Moussorgski -Puccini - Rimski Korsakof -Rossini - Saint Saens - Schumann - Sibélius - Verdi - Wagner -
Tolstoï , apôtre de la non violence et inspirateur de la politique d'éducation libératrice de Gandhi
Extrait d'un document publié par l'encyclopédie de l'Agora mettant en relation le penseur Russe et le philosophe Indien.
http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/K_Gandhi--Gandhi_et_leducation_par_Krishna_Kumar
Texte
Le rejet du système colonial d'éducation que l'administration britannique avait instauré au début du XIXe siècle en Inde constitua une dimension importante de l'effervescence intellectuelle générée par la lutte pour l'indépendance. Ce rejet fut formulé par nombre d'éminentes personnalités indiennes, notamment des dirigeants politiques, des réformateurs sociaux et des écrivains. Mais nul n'opposa à l'éducation coloniale un refus aussi complet et aussi catégorique que Gandhi. Nul non plus ne proposa une solution de rechange aussi radicale. Les critiques que Gandhi adressait à l'éducation coloniale n'étaient qu'un aspect du jugement global for sévère qu'il portait sur la civilisation occidentale. Pour lui, la colonisation et, notamment, son projet éducatif constituaient la négation de la vérité et de la non-violence, les deux valeurs qu'il tenait pour suprêmes. Le fait que les Occidentaux aient consacré «toute leur énergie, leur industrie et leur esprit d'entreprise au pillage et à la destruction des autres races» était pour Gandhi la preuve plus que suffisante du triste état dans lequel se trouvait la civilisation occidentale (1). Il en concluait donc que cette civilisation ne pouvait en aucun cas être un symbole de progrès ni un modèle digne d'être imité ou transplanté en Inde
On aurait tort d'attribuer la position de Gandhi par rapport à l'éducation coloniale à une quelconque xénophobie. Il serait tout aussi erroné d'y voir l'indice d'un subtil dogmatisme revivaliste. Si l'on pouvait lire le plan d'«éducation de base» de Gandhi comme un texte anonyme s'inscrivant dans l'histoire de l'éducation mondiale, on le rattacherait sans difficulté à la tradition des humanistes radicaux occidentaux comme Pestalozzi, Owen, Tolstoï ou Dewey.
[...]Gandhi mena le genre de vie qu'il préconisait dans son projet d'éducation de base, à la ferme Phénix d'abord, puis, un peu plus tard, de façon plus rigoureuse et plus ambitieuse, à la ferme Tolstoï, dont le nom indique qu'à l'époque de cette seconde expérience Gandhi avait lu les ouvrages de l'écrivain russe et était entré en contact avec lui. Nombre des préoccupations
de Gandhi sont attribuables à l'influence de Tolstoï, au premier chef le soin de lutter contre les causes de la violence dans les sociétés humaines. L'attachement de Tolstoï au droit de tout individu à vivre en paix et en liberté, ainsi que son rejet de toutes les formes d'oppression amenèrent Gandhi à se sentir en communauté d'esprit avec lui. Bien qu'il n'ai pas lu les articles de Tolstoï sur l'éducation publiés dans la revue Iasnaia Poliana, l'opinion de Tolstoï pour qui «l'éducation en tant que formation préméditée des individus selon certains schémas est stérile, illégitime et impossible (4)» aurait fort bien pu être exprimée par Gandhi.
Le droit à l'autonomie que Gandhi confère à l'enseignant en ce qui concerne l'organisation des activités scolaires quotidiennes est conforme aux principes libertaires qu'il partageait avec Tolstoï. Gandhi souhaitait affranchir l'enseignant indien du joug de la bureaucratie. A l'époque de l'administration coloniale, l'enseignant avait pour seul rôle de transmettre et d'expliquer les formes et les contenus du savoir que les autorités administratives avaient décidé d'inclure dans les manuels prescrits. Mettant en évidence le rapport entre l'usage obligatoire de manuels et le rôle secondaire de l'enseignant, Gandhi écrit: «Si l'on considère les manuels comme l'instrument de l'éducation, la parole vivante de l'enseignant n'a plus guère de valeur. Un maître qui prend les manuels comme base de son enseignement n'apprend pas à ses élèves à faire preuve d'originalité (5).» Le plan d'éducation de base de Gandhi impliquait que les enseignants cessent d'être asservis aux manuels et aux programmes scolaires imposés[...].