mercredi, 18 novembre 2015 20:51

OEdipe sur la route

Évaluer cet élément
(0 Votes)

Œdipe sur la route est une relecture du mythe œdipien

qui évoque un parcours initiatique au terme duquel le héros se fond littéralement dans l'art. Ici, Œdipe partage avec Orphée la même capacité, celle de ranimer « les trésors perdus de la mémoire » grâce au chant, à la peinture et à l'écriture. Au lieu de se disperser, le roi aveugle retourne à l'unité. Après avoir surmonté ses peurs, il est « encore, est toujours sur la route », dira Antigone à la fin. La route de la connaissance de soi, libérée de la culpabilité et du remords. Antigone, qui l'a accompagné jusqu'au bout, symbolise cette route de la réalisation de soi. Gardienne du principe de vie, elle n'est pas de celles qui se retournent pour voir, par curiosité. De même, quand elle revient à Thèbes pour tenter d'apaiser la rivalité entre ses deux frères, c'est aussi pour dire « oui » à la vie, au futur, à la beauté et pour refuser, dans sa robe déchirée, toutes les manifestations de pouvoir, toutes les guerres. Elle est la part féminine, celle du poétique, de l'amour sans justification, de la patience.

Bauchau mêle l'enthousiasme mystique et la connaissance de l'Antiquité à la psychanalyse, aux philosophies asiatiques et à la foi chrétienne. Henry Bauchau sur Wikipédia

L'artiste et la matière


L'épisode de la vague m'avait beaucoup frappée surtout par cette idée dépourvue d''intention métaphorique (à mon sens ) évoquant la pré-existence dans la falaise , de la vague que sculpterait Oedipe . Sa communion avec la roche , par tous les sens à l'exception de la vue (autre point à creuser surement),son dialogue avec la matière que pénètrent les rêves ;-- les rêves d'ailleurs n'émanent-ils pas de la roche dont ils seraient l'âme ?--sont d'une grande puissance poétique ...

 OEdipe sur la route  (extrait)

[...]
Le cap forme au nord un surplomb sous lequel on ne peut parvenir que par un sentier étroit où s'abritent parfois des chèvres à demi sauvages .Sous le surplomb , il y a une grande paroi sombre que les vagues viennent frapper pendant les tempêtes et qui plonge , d'un mouvement abrupt et menaçant, dans la mer . Oedipe a rêvé qu'il sculptait une falaise. Il vient d'explorer celle-ci avec Clios. Il tâte la pierre des mains , il se hisse dangereusement sur la paroi . Il se colle aux aspérités du rocher, il l'ausculte, l'étreint avec les mouvements lourds, ralentis d'un nageur à demi submergé. Clios lui dit : " La roche ressemble à une énorme vague qui s'élève et va tout engloutir en retombant." Oedipe approuve. "Il y a la vague, il faut trouver un moyen pour qu'elle ne nous emporte pas . Ce n'est pas un homme seul qui peut le faire , il faut une barque et des rameurs."

Oedipe cherche avec son corps, dans la confusion native de la falaise, la forme de la barque qui doit y être, ainsi que la place des rameurs. Soudain il trouve , il est la barque, il la dessine avec son corps dans la pierre . Il veut la sculpter. Clios demande pourquoi .Oedipe répond que c'est à cause de son rêve. A cause d'eux trois, emportés par la mer. Clios ne croit pas qu'on puisse échapper à cette vague. "Il faut travailler la falaise, dit Oedipe, pour entendre ce qu'elle veut nous dire. - C'est un travail immense ! - Il faut commencer tout de suite. Procure-toi des outils. Antigone nous aidera, elle sculpte bien les corps et les visages."
Clios est saisi par ce projet et part au village pour en parler à Antigone et demander des outils aux pêcheurs. Oedipe, resté seul, parcourt à nouveau le rocher pour y reconnaître la vague. Il glisse parfois et se déchire les mains, il ne lui déplait pas de marquer de son sang la falaise. La vague est là et elle est en lui . C'était ainsi lorsqu'il se perdait en contemplant la mer, mais la mer ne résistait pas. Il était heureux en face d'elle, englouti dans son immensité sans contours. Ici tout est dur, franc, chargé d'aspérités comme les pêcheurs de Corinthe qu'il a tant aimés autrefois.
[...]
La roche est dure , mais leurs bras et leurs mains s'endurcissent et Oedipe rappelle qu'il ne faut pas forcer la pierre. la vague est là , déjà là . Il faut seulement l'aider à apparaître, Ils sentent sous leurs mains , sa présence alors que Antigone et Clios ne la voient pas encore de leurs yeux. Lorsqu'ils ont des doutes, ses deux compagnons appellent Oedipe. Il palpe la pierre de ses mains, il l'écoute , il la goutte des lèvres et de la langue Il colle son corps contre elle. Les deux autres sentent alors que la vague existe. Elle a traversé brutalement leurs vies, elle les a submergées ,elle les submergera peut être encore , celà ne les empêche pas d'être vivants......"

voir égement sur le site Le cycle thébain

Lu 10115 fois Dernière modification le lundi, 04 janvier 2016 23:20
Plus dans cette catégorie : « Henry Bauchau

Laissez un commentaire

Assurez-vous d'indiquer les informations obligatoires (*).
Le code HTML n'est pas autorisé.