Il appartient aux cycles des légendes attiques bien que son origine Thrace ne soit jamais oubliée. Toute sa légende se déroule dans ce pays de vastes plaines , balayées par le vent, où l'on situait également une grande partie du cycle de Dyonisos. Parfois fils d'Oeagre , dieu-fleuve et d'une muse (Polymnie, Clio ou Calliope), et tantôt de la fille de Thamyris musicien mythique. Il aurait régné sur un peuple de la Thrace, les Bistoniens, les Odryses ou sur leurs voisins immédiats les Macédoniens. Il est le chanteur par excellence à la fois musicien et poète Il s'accompagne de sa lyre qu'il créa ou qu'il perfectionna en augmentant le nombre de cordes qui de sept devinrent neuf pour correspondre au nombre des Muses .
Les chants d'Orphée avaient un pouvoir magique; ils étaient si beaux que toute la Nature y était sensible. Les fauves le suivaient, les arbres et les plantes s'inclinaient vers lui, mais surtout ils apaisaient les âmes des hommes les plus sauvages.
Orphée prit part à l'expédition des Argonautes pour donner la cadence aux rameurs, calmer les tempêtes et ramener la sérénité dans le coeur des marins. Son initiation aux mystères des Cabires , dieux barbares, assura la protection de l'expédition quand elle traversa leur royaume et son chant surpassa celui des Sirènes .
Peinture :Gustave Moreau : Orphée
La descente aux Enfers
L'épisode le plus célèbre de la légende d'Orphée, sans doute une version mythique du pouvoir sauveur attribués aux rites dont il était le dépositaire .
C'est Virgile à la fin des Géorgiques qui nous a conservé la plus belle version du Mythe mais elle ne semble pas primitive et l'on y devine la trace de l'esprit Alexandrin.
Orphée avait épousé Eurydice, fille d'une Dryade et d'Apollon ou encore elle-même une Dryade. Un jour qu'elle se promenait le long d'une rivière en Thrace, elle fut poursuivie par par Aristée, fils de la nymphe Cyrène et du dieu-fleuve Pénée En courant dans l'herbe elle fut piquée au pied par un serpent et mourut. Orphée inconsolable descendit aux Enfers pour la chercher et la ramener sur terre. Avec sa lyre il charma non seulement les monstres qui gardent les accès du monde infernal, mais les dieux des morts eux-mêmes. Les damnés furent un instant soulagés de leurs peines, la roue d'Ixion s'arrêta, Tantale se sentit rassasié etc. Hadès et Perséphone consentirent à rendre Eurydice mais à la condition qu' Orphée ne se retournât pas une seule fois lors de leur retour vers le jour , avant d'être sorti du royaume des morts . Orphée accepta mais au dernier moment le doute s'empara d'Orphée et il voulut en se retournant s'assurer de la sincérité des dieux .
Eurydice alors déjà s'éloigne et meurt une seconde fois. Les Enfers restèrent ensuite obstinément fermés et Orphée s'en revint seul, inconsolable, parmi les hommes .
La mort d'Orphée
La mort d'Orphée est racontée de diverses manières et sert de support à différents mythes .
On admet généralement qu'il fut tué et déchiré par des femmes Thraces à son retour des Enfers .
Mais les causes divergent :
Tantôt on prétend que sa fidélité à la mémoire d'Eurydice inspira la jalousie des femmes Thraces qui se considérèrent comme insultées et le condamnèrent à mort .
D'autrefois, qu'Orphée ayant renoncé à la compagnie des femmes se serait entouré de jeunes gens. Les femmes alors auraient décidé de le punir pour ses amours contre nature .
Enfin, en revenant des Enfers Orphée aurait fondé des mystères au cours desquels il initiait les hommes aux secrets qu'il avait découverts dans l'Au-delà. Mais il en interdisait l'accès aux femmes. Un soir que les hommes étaient rassemblés chez lui sans armes, les femmes massacrèrent Orphée et ses fidèles .
Quand les femmes Thraces eurent déchiré le corps d'Orphée , elles en jetèrent les morceaux dans le fleuve qui les emporta jusqu'à la mer. La Tête et la Lyre du poète parvinrent jusqu'à Lesbos où les habitants élevèrent un tombeau pour abriter ces reliques .
C'est autour de cette figure d'Orphée que se forma la théologie dite orphique, qui semble avoir été essentiellement une révélation des mystères de la mort et une série de pratiques et de conseils destinés à permettre aux fidèles de parvenir au pays des Bienheureux.
D'après : Mythologie de la Méditerranée au Gange sous la dir. de P. Grimal)
Parfum des Moires
Hymnes orphiques
(Traduction Leconte de Lisle )
Moires infinies, chères filles de la noire Nyx, entendez ma prière, ô Moires aux mille noms, qui, autour du marais Ouranien, où l'Eau claire flue des rochers sous une épaisse nuée, hantez l'immense Abîme où sont les âmes des morts ; vous qui allez vers la race des vivants, accompagnées de la douce Espérance et cachées sous des voiles de pourpre, à travers la Prairie fatidique, là où la Sagesse dirige votre char qui embrasse tout dans sa course, aux limites de la Justice, de l'Espoir et des Inquiétudes, et de la Loi antique, et de l'Empire régi par des lois puissantes, car la Nécessité sait seule ce que réserve la vie, et aucun autre des Immortels qui sont sur le faîte neigeux de l'Olympos ne le sait, si ce n'est Zeus ; et la Nécessité et l'esprit de Zeus savent seuls tout ce qui nous arrivera. Mais, ô Nocturnes, soyez-moi bienveillantes, Atropos, Lakhésis, Klothô ! Venez, ô Illustres, aériennes, invisibles, inexorables, toujours indomptées, dispensatrices universelles, Déesses rapaces, nécessairement infligées aux mortels ! O Moires, accueillez mes libations sacrées et mes prières, soyez propices à vos sacrificateurs et au chant suprême qu'Orpheus a composé pour vous.
Hymnes orphiques : http://www.mythorama.com/_mythes/indexfr.php?liste=cho
Orphée inspirateur des arts:
Poésie
- Orphée de Victor Hugo
J'atteste Tanaïs, le fleuve aux six urnes,
Et Zeus qui fait traîner les grands chars nocturnes
Rhéa par des taureaux et Nyx par des chevaux,
Et les anciens géants et les hommes nouveaux,
Pluton qui nous dévore, Uranus qui nous crée,
Que j'adore une femme et qu'elle m'est sacrée.
Le monstre aux cheveux bleus, Poséidon m'entend ;
Qu'il m'exauce. Je suis l'âme humaine chantant,
Et j'aime. L'ombre immense est pleine de nuées,
La large pluie abonde aux feuilles remuées,
Borée émeut les bois, Zéphir émeut les blés,
Ainsi nos coeurs profonds sont par l'amour troublés.
J'aimerai cette femme appelée Eurydice,
Toujours, partout ! Sinon que le ciel me maudisse,
Et maudisse la fleur naissante et l'épi mûr !
Ne tracez pas de mots magiques sur le mur.
La Légende des Siècles Recueil XXXVI - Le Groupe des Idylles
- Sonnets à Orphée de Rilke
Un dieu a ce pouvoir. Mais un homme , dis-moi,
Comment le suivrait-il par cette étroite lyre ?
Discorde est ton esprit. Pas de temple dressé
Pour Apollon à la croisée des chemins du cœur.
Le chant de ton enseignement n'est pas désir,
Ni la quête d'un bien qu'on puisse atteindre enfin.
Le chant est existence. Et le Dieu l'a facile.
Mais nous, Quand sommes-nous ? A quel moment fait-il
servir la terre et les étoiles à notre être ?
Ce n'est rien de cela , jeune homme , quand tu aimes,
Et même si la voix force la bouche. –Apprends
A oublier que tu chantas. Cela se passe.
Chanter en vérité se fait d'un autre souffle.
Rien d'autre qu'un souffle. Une brise en Dieu. Un vent .
(Traduction de Armel Guerne )
(je ne suis pas germaniste , alors pitié pour les fautes !)
Ein Gotts vermags. Wie aber, sag mir, soll
Ein Mann ihm folgen durch die schmale Leier?
Sein Sinn ist Zwiespalt. An der Kreuzung zweier
Herzwege steht kein Templ für Apoll.
Gesang, wie du ihn lehrst, ist nicht Begehr
nicht Werbung um ein endlich noch Erreichtes;
Gesang ist Dasein. Für den Gott ein Leichtes.
Wann aber sind wir ? Und wann wendet er
an unser Sein die Erde und die Sterne ?
Dies ists nicht, Jüngling, dass du liebst, wenn auch
Die Stimme dann den Mund dir aufstösst, - Ierne
Vergessen, dass du aufsangst. Das Verrinnt.
In Wahrheit singen , ist ein andrer Hauch.
Ein Hauch um nichts. Ein Wehn im Gott. Ein Wind.
(Sonnets à Orphée de Rilke)
Peinture:
Nicolas Poussin, Jean-Baptiste Camille Corot, Gustave Moreau, Jean Cocteau , Jean Delville( http://www.poetes.com/index.php)
Musique :
Monteverdi : l'Orféo
Gluck: Orfeo ed Euridice
"Che faro senza Euridice " Contre-ténor Jochen Kowaslki
Berlioz (version de l'opéra de Gluck)
Stravinsky :Orpheus (Ballet en trois tableaux)
7ème art
- Orfeo Negro de Marcel Camus (1959).
Des sites web :
Jardin des Muses : http://www.pierdelune.com/orphee.htm