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vendredi, 27 novembre 2015 17:47

La Théogonie

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Extrait   du site de Philippe Remacle ( où l'on  pourra  prendre connaissance  des  notes numérotées et poursuivre la  lecture  de   la Théogonie dans la traduction  de   A  Bignan)

 

LA THÉOGONIE


Commençons (1) par invoquer les Muses Héliconiennes ,reines de l’Hélicon la grande et divine montagne. (2), les Muses qui, habitant cette grande et céleste montagne, dansent d'un pas léger autour de la noire fontaine et de l'autel du puissant fils de Cronos, et baignant leurs membres délicats dans les ondes du Permesse, de l'Hippocrène et du divin Olmée, forment sur la plus haute cime de l'Hélicon des choeurs admirables et gracieux. Lorsque le sol a frémi sous leurs pieds bondissants, dans leur pieuse ardeur, enveloppées d'un épais nuage, elles se promènent durant la nuit (3) et font entendre leur belle voix en célébrant Zeus armé de l'égide, l'auguste JHera d'Argos, qui marche avec des brodequins d'or,-- la fille de Zeus , Athéné aux yeux pers ,-- et Phoibos-Apollon (4), et l’archère Artémis ,-- et Poseidon, qui entoure et ébranle la terre, -- la vénérée Thémis (5), Aphrodite aux yeux qui pétillent,-- Hébé à la couronne d'or, la belle Dioné, --Létô(6), Japet ,Cronos aux pensées fourbes ,- l’Aurore et le grand Soleil, et la Brillante Lune,-- , et Terre,et le grand Océan et la Nuit ténébreuse (7),--et toute la race sacrée des immortels toujours vivants ! Jadis elles enseignèrent à Hésiode (8) un beau chant, tandis qu'il faisait paître ses agneaux au pied du céleste Hélicon. Ces Muses de l'Olympe, ces filles de Zeus, maître de l'égide, m'adressèrent ce langage pour la première fois :
"Pâtres gîtées aux champs, tristes opprobres de la terre, vous qui n’êtes rien que ventres, nous savons inventer beaucoup de mensonges semblables à la vérité ; mais nous savons aussi dire ce qui est vrai, quand tel est notre désir."
Ainsi parlèrent les éloquentes filles du grand Zeus, et elles me remirent pour bâton un rameau de vert laurier superbe à cueillir ; puis, m'inspirant un divin langage pour me faire chanter le passé et l'avenir, elles m'ordonnèrent de célébrer l'origine des bienheureux Immortels et de les choisir toujours elles-mêmes pour objet de mes premiers et de mes derniers chants (9). Mais pourquoi m'arrêter ainsi autour du chêne ou du rocher (10) ?
Célébrons d'abord les Muses qui, dans l’Olympe, charment la grande âme de Zeus et marient leurs accords en chantant les choses passées, présentes et futures (11). Leur voix infatigable coule de leur bouche en doux accents (12), et cette harmonie enchanteresse, au loin répandue, fait sourire (13) le palais de leur père qui lance la foudre. On entend résonner la cime de l’Olympe neigeux (14), demeure des Immortels. D'abord, épanchant leur voix divine, elles rappellent l'auguste origine des dieux engendrés par la Terre et par le vaste Ciel étoilé (15), et chantent leurs célestes enfants, auteurs de tous les biens. Ensuite, célébrant Zeus, ce père des dieux et des hommes, elles commencent et finissent par lui tous leurs hymnes et redisent combien il l'emporte sur les autres divinités par sa force et par sa puissance. Enfin, quand elles louent la race des mortels et des Géants vigoureux (16), elles réjouissent dans le ciel l'âme de Zeus, ces Muses de l'Olympe, filles du dieu qui porte l’égide. Dans la Piérie, Mnémosyne, qui régnait sur les collines d'Éleuthère, unie au Cronide, mit au jour ces vierges qui procurent l’oubli des maux et la fin des douleurs. Durant neuf nuits, le prudent Zeus, montant sur son lit sacré, coucha près de Mnémosyne, loin de tous les Immortels. Après une année, les saisons et les mois ayant accompli leur cours et des jours nombreux étant révolus, Mnémosyne enfanta neuf filles animées du même esprit, sensibles au charme de la musique et portant dans leur poitrine un coeur exempt d'inquiétude ; elle les enfanta près du sommet élevé de ce neigeux Olympe où elles forment des choeurs brillants et possèdent des demeures magnifiques. Àleurs côtés se tiennent les Grâces et le Désir dans les festins, où leur bouche, épanchant une aimable harmonie, chante les lois de l’univers et les fonctions respectables des dieux. Fières de leurs belles voix et de leurs divins concerts, elles montèrent dans l'Olympe : la terre noire retentissait de leurs accords, et sous leurs pieds s'élevait un bruit ravissant tandis qu'elles marchaient vers l'auteur de leurs jours, ce roi du ciel (17), ce maître du tonnerre et de la brûlante foudre, qui, puissant vainqueur de son père Cronos, distribua équitablement à tous les dieux les emplois et les honneurs.
Voilà ce que chantaient les Muses, habitantes de l'Olympe (18), les neuf filles du grand Zeus, Clio, Euterpe, Thalie, Melpomène, Terpsichore, Érato, Polymnie, Uranie et Calliope, la plus puissante de toutes, car elle sert de compagne aux rois vénérables. Lorsque les filles du grand Zeus veulent honorer un de ces rois, nourrissons des cieux, dès qu'elles l'ont vu naître, elles versent sur sa langue une molle rosée, et les paroles découlent de sa bouche douces comme le miel. Tous les peuples le voient dispenser la justice avec droiture lorsqu'il apaise tout à coup un violent débat par la sagesse et l'habileté de son langage, car les rois sont doués de prudence afin que, sur la place publique, en proférant de pacifiques discours, ils fassent aisément restituer à leurs peuples tous les biens dont ils ont été insolemment dépouillés. Tandis que ce prince marche dans la ville, les citoyens, remplis d'un tendre respect, l'invoquent comme un dieu et il brille au milieu de la foule assemblée. Tel est le divin privilège que les Muses accordent aux mortels.
Les Muses et Apollon, qui lance au loin ses traits, font naître sur la terre les chantres et les musiciens ; mais les rois viennent de Zeus. Heureux celui que les Muses chérissent ! un doux langage découle de ses lèvres. Si un mortel, l'âme déchirée par un récent malheur, s'afflige et se lamente, qu'un chantre, disciple des Muses, célèbre la gloire des premiers hommes et des bienheureux Immortels habitants de l'Olympe, aussitôt l'infortuné oublie ses chagrins ; il ne se souvient plus du sujet de ses maux et les présents des vierges divines l'ont bientôt distrait de sa douleur.....

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Lu 5898 fois Dernière modification le vendredi, 27 novembre 2015 18:08

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